F. Godier

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F. Godier (?-?)

Une unique œuvre de F. Godier est conservée dans la Collection Sainte-Anne, provenant de la colonie familiale d’Ainay-le-Château dans l’Allier.

La notion de colonie familiale désigne un lieu où les malades dits « inoffensifs » peuvent être accueillis par des aides-soignants ou par des familles nourricières[1]. Ce nouveau modèle de soin des patients est initié en 1890 par Auguste Marie, jeune médecin à Sainte-Anne. Accompagné du médecin en chef Bouchereau[2], il fait ouvrir la première colonie familiale de femmes à Dun-sur-Auron puis la colonie familiale d’hommes d’Ainay-le-Château, dont F. Godier est issu.

Sensible aux productions des malades, Auguste Marie a constitué une collection d’œuvres de patient qui ont été exposées dans son « petit musée de la folie » dès 1905[3], qu’il a continué d’alimenter en poursuivant sa carrière à l’asile de Villejuif puis en tant que médecin en chef à Sainte-Anne. De ce fait, il est probable qu’à Ainay-le-Château, l’activité artistique ait été valorisée.

La nature décorative de l’œuvre de F. Godier laisse à penser qu’elle serait le fruit d’un atelier de copie au sein de la colonie, activité qui était en vogue en tant que thérapie occupationnelle. Certains psychiatres encourageaient en effet leurs patients à faire des copies d’œuvres d’art classiques et populaires. Ici, il semble que cette aquarelle soit une interprétation tout à fait singulière d’une Sainte-Cécile, patronne des musiciens. Thème iconographique traditionnel de l’art chrétien, Sainte-Cécile est reconnaissable par quatre attributs[4] : le linge bleu qu’elle porte, la harpe[5], le livre ouvert – objet qui représente le savoir,  l’apprentissage et la doctrine religieuse -, ainsi que l’angelot, qui l’accompagne systématiquement. Le sein découvert de la Sainte a deux sens différents. Pendant la Renaissance, le sein découvert représentait l’innocence et l’amour de Dieu. Durant toutes les autres périodes, il pouvait signifier la luxure et le dévergondage.

En somme, F. Godier aurait pu avoir sous les yeux la Sainte-Cécile à la harpe de l’atticiste Jacques Stella (1596-1657) ou encore la Sainte-Cécile chantant les louanges du Seigneur de Pierre Mignard (1612-1695), qui sont deux versions traditionnelles du sujet sans le sein découvert, qui pourrait alors être une volonté de l’artiste soit du fait de sa connaissance de l’iconographie chrétienne, soit pour ajouter une orientation grivoise à l’œuvre.

F. Godier nous propose une interprétation atypique d’un sujet traditionnel de l’histoire de l’art, où les couleurs vives et les contrastes entre les tons chauds et froids ajoutent une touche moderne pour un sujet classique.

[1] RIGONDET Juliette, Un village pour aliénés tranquilles, Paris, Fayard, 2020, p. 33.

[2] Ibid., p. 17.

[3] MOREHEAD Allison, « The Musée de la folie », Journal of the History of Collections, Vol. 3, N°1, 2011, pp.101-126.

[4] NODET Henri, Traité d’iconographie chrétienne, Paris, Société des librairies ecclésiastiques et  religieuses, 1898.

[5] Sainte-Cécile est également représentée avec un orgue ou un violon.

Retrouvez d’autres oeuvres sur la collection en ligne.

Découvrez le catalogue de l’exposition Entre art des fous et art brut disponible à la librairie du MAHHSA.

F. Godier
L’art musical
1935
Aquarelle et encre sur papier
31 x 23,7 cm
MAHHSA
Inv. 0963
© CEE-MAHHSA Dominique Baliko